La médecine française du XVIIe siècle apparaît en effet bien impuissante face à la peste ou à la variole, deux grands fléaux de l’époque. Les femmes meurent souvent en couches et sur 1000 nouveau-nés, seule la moitié parvient à atteindre l’âge adulte.
Dans ce siècle qu’on appelle le Grand, la médecine semble être épargnée par la révolution scientifique en cours. L’enseignement dispensé dans les 24 facultés du Royaume reste presque exclusivement basé sur les connaissances des anciens : Aristote, Hippocrate et surtout Galienus.
Les cours d’anatomie sont rares, sauf à la faculté de Montpellier qui pratique déjà la dissection. Nous sommes en effet très loin des abdominoplastie d’aujourd’hui en 2020 !
La théorie des 4 humeurs (sang, flegme, bile jaune et bile noire) suffit encore et toujours pour expliquer tous les dysfonctionnements. Si une maladie survenait, c’était le signe d’un déséquilibre entre les humeurs. Il fallait alors “évacuer” l’humeur responsable.
Pour obtenir la guérison, la thérapie varie peu : purges et saignées. Même les médecins ont salivé !
Mais il faut faire attention à ne pas tomber dans la caricature, car depuis le XVIIIe siècle, de réels progrès ont été réalisés, souvent encouragés par le roi lui-même. D’un côté des institutions d’abord : pour l’édit de Marly, en 1707, Louis XIV réforme le stui médical de la médecine, visant à uniformiser les cours d’un côté à l’autre du Royaume.
Dans un siècle marqué par des guerres incessantes, le pouvoir royal crée le corps de chirurgie militaire et les officiers de santé, qui s’avèrent être un terrain d’expérimentation essentiel.
C’est du côté de la chirurgie, bien que considérée comme une médecine subordonnée, que l’on trouve les progrès les plus substantiels. “Pour l’anecdote, l’opération de la fistule anale de Louis XIV est toujours mentionnée”, explique le professeur Anotine Ermakoff, qui prépare une thèse sur l’histoire de la médecine à l’université de Paris 7-Diderot.
Cette délicate opération, menée avec succès par le docteur Charles-François Félix, fait sensation à la Cour. Le premier chirurgien du roi devient ainsi une figure de proue au même titre que Georges Mareschal ou François de Lapeyronnie.
L’importance croissante de cette discipline, jusqu’alors reléguée au second plan, est reconnue en 1731 par la fondation de l’Académie royale de chirurgie sous Louis XV. Parmi les grandes avancées de la chirurgie, on peut citer la chirurgie des pierres ou de la cataracte.
Montpellier surclasse Paris
Sur le plan thérapeutique, les progrès sont assez faibles. On peut citer tout d’abord la découverte de la quinine par les Jésuites en Amérique latine, qui permet de soigner les fièvres dites intermittentes, autrement appelées fièvre des marais. Cela n’empêche pas qu’elle soit discréditée par la faculté conservatrice de Paris.
Une institution que Louis XIV et ses successeurs n’hésiteront pas à renier, choisissant volontiers comme médecins personnels les diplômés de la faculté de Montpellier, jugés plus progressistes.
Le roi interviendra également dans le violent débat qui oppose depuis des décennies la faculté de Paris aux partisans des théories de l’anglais William Harvey sur la circulation sanguine. Allant à l’encontre des enseignements des anciens, William Harvey démontre en 1628 que le cœur est une pompe : il explique que le sang entre dans le cœur par la veine cave pour réussir à traverser l’artère principale.
Louis XIV finit par en prendre acte en épousant la thèse de Harvey, ordonnant, en 1673, l’enseignement de ses thèses au Jardin du Roi, à l’ancien Jardin des Plantes et au Musée d’Histoire Naturelle.
Au-delà du rôle d’initiateur ou de modèle, le pouvoir royal, surtout au XVIIIe siècle, a commencé à mettre en place ce que l’on peut appeler l’aube d’une politique de santé publique. Les conditions sont alors réunies : “Au fur et à mesure que l’influence de la religion se relâche, on peut éventuellement s’intéresser aux corps. Il semble cependant que le développement de la science soit une sorte de gloire pour la nation. Enfin, les rois considéraient désormais la population comme une richesse du pays” comme l’affirme Catriona Seth.
Les guerres nécessitent un grand nombre de soldats, et les Rois, à partir du 18ème siècle, ont perçu l’avantage que représente une population en bonne santé sur le plan géopolitique. De plus, les théories mercantiles se sont développées, mettant en avant l’importance de la culture du sol, ce qui a nécessité un grand nombre d’armes.
Madame du Coudray, sage-femme de renom, et sur les bons instruments pour la diffusion des techniques d’accouchement
Le pouvoir royal veut donc des sujets nombreux et sains, et il prend des mesures pour y parvenir : pour lutter contre la forte mortalité des mères et des nouveau-nés, Louis XV demande à Madame du Coudray, sage-femme de renom, de développer la formation de ses sœurs dans le pays.
Louis XV fait également distribuer dans les campagnes des boîtes de médicaments pour les pauvres, sortes de kits de survie, destinés à répondre aux maladies les plus courantes.
En 1776, sous la direction du médecin parisien Félix Vicq d’Azyr, la Société royale de médecine est créée : des correspondants dans chaque province sont chargés de fournir des informations sur les épidémies et les épizooties à Paris.
L’ange anatomique de Jacques Gautier d’Agoty – 1746
L’idée qu’une médecine doit être basée sur l’observation finit par s’imposer, ouvrant la voie à la médecine moderne. Mais il faudra attendre le XIXe siècle avec les progrès de l’hygiène, pour la découverte de l’anesthésie, de l’antisepsie et de l’asepsie afin que les patients puissent réellement bénéficier de ses progrès.
Chaque année, quelques dizaines de nouveaux médicaments sont autorisés à être utilisés, mais dans leur sillage, des dizaines de milliers de candidats médicaments sont tombés dans l’oubli. Le parcours de recherche et développement de ces nouveaux médicaments qui arrivent sur le marché aura duré environ 12 ans et coûté environ 1,15 milliard de CHF.
Le voyage aura commencé dans un laboratoire universitaire où les chercheurs, avec des subventions des organismes de recherche ou de l’industrie pharmaceutique, auront entrepris des recherches fondamentales pour comprendre les processus à l’origine d’une maladie, souvent au niveau cellulaire ou moléculaire. C’est en comprenant mieux les processus et les voies de la maladie que l’on identifie les cibles des nouveaux traitements. Il peut s’agir d’un gène ou d’une protéine jouant un rôle dans le processus pathologique, qu’un nouveau traitement pourrait perturber, par exemple en bloquant un récepteur essentiel.
Une fois qu’une cible potentielle a été identifiée, les chercheurs recherchent alors une molécule ou un composé qui agit sur cette cible. Historiquement, les chercheurs se sont tournés vers des composés naturels issus de plantes, de champignons ou d’animaux marins pour trouver la base de ces médicaments candidats mais, de plus en plus, les scientifiques utilisent les connaissances acquises par l’étude de la génétique et des protéines pour créer de nouvelles molécules à l’aide d’ordinateurs. Jusqu’à 10 000 composés peuvent être envisagés et ramenés à 10 ou 20 qui pourraient théoriquement interférer avec le processus de la maladie.
L’étape suivante consiste à confirmer que ces molécules ont un effet et qu’elles sont sûres. Avant que les molécules ne soient administrées à l’homme, des tests de sécurité et d’efficacité sont réalisés sur des modèles informatiques, des cellules et des animaux. Environ la moitié des candidats passent cette étape de tests précliniques et les cinq à dix composés restants sont maintenant prêts à être testés chez l’homme pour la première fois. L’entreprise déposera une demande d’essai clinique (CTA), qui sera examinée par des experts médicaux et scientifiques, lesquels décideront si les recherches préliminaires menées sont suffisantes pour permettre la réalisation de tests sur l’homme.
Accumulation des NEM approuvées par la FDA au fil du temps depuis 1930. L’approbation de deux molécules, la morphine et l’aspirine, est antérieure à la création de la FDA et de ses précurseurs.
Nombre d’entreprises ayant au moins une nouvelle entité moléculaire (NME) approuvée par la FDA
Nombre de sociétés différentes ayant obtenu l’approbation d’au moins une nouvelle entité moléculaire (NME). Au fur et à mesure que les organisations fusionnent ou sont acquises, les chiffres peuvent diminuer.
Essais cliniques
Si une demande d’autorisation de mise sur le marché est accordée, la sécurité et la pharmacologie d’un médicament candidat seront d’abord testées sur un petit groupe de volontaires sains dans le cadre d’un essai de phase
1. De petites doses du composé seront administrées à un groupe de 20 à 100 volontaires sains étroitement surveillés. Au moins la moitié des composés seront généralement considérés comme suffisamment sûrs pour passer aux essais de phase
2. Les études de phase 2 examinent l’efficacité d’un composé chez des patients volontaires atteints de la maladie que le médicament est censé traiter. Afin d’éviter d’exposer inutilement un volontaire à une substance potentiellement dangereuse, ces études utilisent le plus petit nombre possible de patients pour obtenir une puissance statistique suffisante pour déterminer l’efficacité, généralement 100 à 500 patients, qui sont suivis et évalués en permanence. L’objectif des études de phase 2 est de déterminer la dose et le mode d’administration les plus efficaces (par exemple, par voie orale ou intraveineuse), l’intervalle de dosage approprié, et de reconfirmer la sécurité du produit. La plupart des médicaments qui échouent lors des essais cliniques le font à la phase 2 parce qu’ils s’avèrent inefficaces, présentent des problèmes de sécurité ou des effets secondaires intolérables.
Les candidats qui passent le cap de la phase 2 seront ensuite testés sur une population beaucoup plus importante de patients dans le cadre d’essais de phase 3, souvent de 1 000 à 5 000 personnes réparties sur plusieurs sites internationaux. L’objectif de ces essais de phase 3 est de reconfirmer les résultats de la phase 2 sur une plus grande population et d’identifier le meilleur schéma posologique. Ce faisant, la société pharmaceutique doit générer suffisamment de données sur la sécurité et l’efficacité pour démontrer le rapport risque-bénéfice global du médicament et permettre de soumettre une demande d’autorisation aux autorités réglementaires. Malgré les tests rigoureux qui ont déjà eu lieu, environ 10 % des médicaments échoueront à ce stade.
Marketing
Le processus de développement des médicaments et d’autorisation de mise sur le marché est similaire dans le monde entier. Pour les médicaments qui passent par la phase 3, une demande d’autorisation de mise sur le marché est déposée auprès de l’autorité réglementaire nationale dans la plupart des pays.. Toutefois, en Europe, les entreprises pharmaceutiques choisissent généralement de déposer une demande centrale auprès de l’Agence européenne des médicaments afin d’obtenir une autorisation de mise sur le marché pour l’ensemble de l’Europe et d’éviter de devoir déposer de multiples demandes auprès de chaque pays. La demande contient des informations précliniques et cliniques obtenues lors des essais, notamment des informations sur la composition chimique et le processus de fabrication, la pharmacologie et la toxicité du composé, la pharmacocinétique humaine, les résultats des essais cliniques et l’étiquetage proposé.
Si une licence est accordée, ce n’est pas la fin du processus. Dans certains pays, les entreprises pharmaceutiques ont besoin de plus qu’une autorisation de mise sur le marché pour que la plupart des patients puissent avoir accès au traitement dans le cadre du NHS on recommande que le traitement soit disponible. Le NICE prend ses décisions en fonction du coût et de l’efficacité d’un traitement afin de déterminer si le rapport coût-bénéfice qu’il offre est abordable.
Les essais cliniques peuvent également se poursuivre. Les autorités réglementaires peuvent insister sur les essais de phase 4 pour la surveillance de la sécurité post-commercialisation (pharmacovigilance) ou ils peuvent être entrepris par la société pour lui permettre de cibler des marchés distincts. Par exemple, pour permettre l’utilisation du médicament chez des patients présentant des problèmes médicaux complexes ou chez des femmes enceintes qui n’auraient probablement pas participé aux essais précédents, et pour s’assurer qu’il n’y a pas d’interaction avec d’autres médicaments.
Breveter
Les entreprises pharmaceutiques feront breveter toute molécule qui s’avère prometteuse au début du processus de développement. Le brevet empêche les autres entreprises de la copier pendant 20 ans et couvre de nombreux aspects de la propriété intellectuelle d’un médicament, notamment sa fabrication, sa formulation et, dans certains cas, son utilisation.
L’objectif d’un brevet est de permettre à la société pharmaceutique qui l’a développé de récupérer ses coûts de développement et de réaliser un bénéfice pour couvrir les coûts de développement des médicaments qui ont échoué au cours du processus de test, ainsi que d’investir dans le développement de futurs médicaments innovants. Lorsqu’un médicament a subi les tests requis et a été breveté, la moitié de la période de validité du brevet a généralement expiré.
Une fois que le brevet d’un médicament a expiré, des versions génériques de ce médicament peuvent être fabriquées et commercialisées. Pour certains médicaments, la période de protection par brevet peut être prolongée jusqu’à cinq ans et demi supplémentaires, à condition que cela ne porte pas la durée de protection par brevet du médicament au-delà de 15 ans après la date d’approbation réglementaire.